On a testé en famille: la lagune de Venise en Pénichette
C’est l’une des expériences de voyage les plus extraordinaires que nous avons pu vivre en famille. Fin septembre, nous embarquions à bord d’une Pénichette Locaboat pour explorer, pendant une semaine, la lagune de Venise et sa quinzaine d’îles et îlots. Nul besoin de permis pour piloter les confortables bateaux habitables loués par la compagnie et s’offrir le luxe, entre autres découvertes fabuleuses, d’admirer la Cité des Doges depuis l’eau…
Par Sarah Visse
Samedi, rendez-vous est donné à la base Locaboat de l’île de Chioggia, reliée au continent par une série de ponts. On découvre le bateau: 3 cabines doubles (chacune avec leur wc-salle de douche), un petit salon avec poste de pilotage, une cuisine parfaitement équipée. Sur le pont, un second poste de pilotage voisine un salon extérieur avec une tonnelle pour se protéger du soleil, encore généreux au début de l’automne. Le pied. Plusieurs membres de l’équipe, qui parlent bien le français, se relaient pour nous aider à embarquer les bagages, nous expliquer les rudiments de la navigation dans la lagune, nous emmener faire un tour pour nous exercer à faire marche-avant/marche-arrière et suivre les chenaux marqués par des piquets en bois. On nous remet une carte et un guide, avec les attraits touristiques à ne pas manquer et toutes les infos pratiques: où amarrer son bateau pour la nuit, où faire le plein d’eau et d’électricité, les restos au bord de l’eau disposant d’un quai, les numéros d’urgence à appeler 24h/24 en cas de pépin…
Pique-nique et plongeon dans la lagune, face à l’île «hantée»
Après une première nuit au port de Chioggia, où l’on se ravitaille dans le joli centre historique, c’est le départ! Il faut à peine 2h30 de navigation pour rejoindre la Ville Eternelle en passant, par des chenaux tranquilles, devant des quartiers de pêcheurs aux maisons colorées. On croise d’ailleurs des bateaux de pêche, ainsi que des cabanes de pêcheurs sur pilotis.
Plus loin, on approche de la petite île de Poveglia, dont l’unique édifice est une ancienne maison de repos à l’abandon. La légende raconte que le lieu est hanté mais, à la place des fantômes, nous voyons des Vénitiens profiter de la quiétude des lieux pour prendre le soleil et pique-niquer. Certains ne mettent pas pied à terre, préférant se regrouper entre amis ou en famille sur l’eau comme on se réunirait au parc, en attachant ensemble leurs embarcations. Ils piquent des têtes et, comme il fait chaud, nous jetons l’ancre pour faire comme eux… L’endroit est un petit paradis.
La vue sur Venise depuis l’eau: un tableau de grand maître!
En fin d’après-midi, nous mettons le cap sur Venise en longeant le Lido, cordon littoral de 12 km séparant la lagune de la mer Adriatique. C’est ici qu’on trouve la grande plage de Venise, dont le sable fin est bordé de demeures et palaces Belle Epoque, tel le Grand Hôtel des Bains, décor du film «Mort à Venise» de Visconti. Le Lido est l’une des rares îles de la lagune où les bicyclettes sont autorisées donc profitez-en si, comme nous, vous embarquez les vélos à bord du bateau. Avec le nombre de canaux et de ponts qui les traversent, les autres îles, elles, se visitent uniquement à pied.
Nous contournons l’île de La Guidecca et l’hôtel mythique qui occupe sa pointe: le Cipriani, où les suites, au cœur de somptueux jardins, se louent minimum 800 euros la nuit. Et enfin… Venise, qui s’offre à notre vue, toute entière: la place Saint-Marc, le Palais des Doges, le Pont des Soupirs, l’Hôtel Danieli (un autre mythe), le Campanile, la Tour de l’Horloge… La carte postale de la Cité des Doges nous apparaît comme un tableau de maître, éclairé par une superbe lumière de fin d’après-midi. En avant-plan et tout autour de nous: une effervescence de vaporettos (bateaux-bus), de gondoles et de bateaux-taxis qui croisent des yachts de milliardaires, tous visiblement habitués à éviter les navigateurs débutants tels que nous. Le spectacle est partout et on ne sait plus où regarder tant c’est beau.
Comme des Vénitiens…
Pour 100 euros, nous pouvons passer la nuit à la marina de l’île de San Giorgio Maggiore, face à la place Saint-Marc. Mais nous décidons de poursuivre la navigation une quinzaine de minutes pour longer la Sérénissime en entier jusqu’à la marina de Sant’Elena (50 euros la nuit pour le bateau, avec l'accès à l’eau, à l’électricité et au wifi) afin de loger à Venise-même et pouvoir directement découvrir la ville à pied.
Ce soir-là, nous nous sentons comme des Vénitiens! A deux pas de la marina, nous dégustons «pastas» et gnocchis dans les sympathiques trattorias du parc delle Rimembranze, dont les pelouses bordent la lagune et accueillent des aires de jeux où notre petit garçon de 2 ans se mêle aux enfants du quartier, qui n’est pas encore celui des touristes.
Le lendemain matin, nous parcourrons à notre aise la longue promenade au bord de l’eau qui aligne ses palais jusqu’à la place Saint-Marc et revenons à la Pénichette en fin de journée par l’intérieur des «sestiers» (les quartiers) de San Marco et du Castello, l’un de plus authentiques et agréables de la cité.
Au quatrième jour, nous n’en n’avons pas encore vu assez de Venise! Cette fois, nous irons passer la nuit au quai Locaboat de l’île de Vignole, où les clients de la compagnie peuvent gratuitement s’amarrer, se raccorder à l’eau et à l’électricité. Ce quai, installé dans un canal, est à l’abri du vent et donc des vagues et nous passons une nuit sans remous (au sens propre!) avec le même confort que dans une marina payante, tout en étant à quelques arrêts de vaporettos de Venise, où nous visitons cette fois les sestiers de Cannaregio, Santa Croce, San Polo et le Dorsoduro; passant d’une rive à l’autre du Grand Canal grâce aux vaporettos.
Murano, Burano: verre, dentelle et Casanova
Départ ensuite pour d'autres îles de la Lagune: Murano et Burano, où des marinas (50 euros la nuit) ou quais Locaboat (gratuits) permettent de dormir à 2 pas des centres historiques. Si l'on connaît Murano pour avoir abrité les amours torrides de Casanova avec des nonnes du couvent Santa Maria degli Angeli (aujourd’hui disparu), l'île est surtout célèbre pour son verre, artisanat dans lequel elle s'est spécialisée dès le 13e siècle, lorsque les verriers de Venise furent contraints d’installer leurs fours à Murano afin d’éviter les incendies en ville. Le long des canaux, on visite ainsi, comme autant de petits musées, une succession d’ateliers (réservez pour une démonstration de soufflage de verre), de galeries et de boutiques aux créations parfois étonnement contemporaines: luminaires, bijoux, vaisselle, vases, figurines, bouchons de bouteille…
Burano, elle, doit sa renommée à la dentelle, mais aussi à ses très photogéniques demeures colorées le long des canaux turquoise. Traditionnellement, les pêcheurs peignaient ainsi leur maison afin de la repérer facilement même par temps de brume. Aujourd’hui, la loi oblige les habitants à maintenir l’usage en repeignant leurs murs chaque année dans la même couleur vive, ce qui explique l’état impeccable des façades.
A Burano et Murano, on trouve de nombreux petits bars et restaurants bordant les voies d’eau offrant des cadres idylliques pour siroter un spritz à l’apéro et déguster la pêche du jour à l’heure du dîner.
Des petits moments uniques
Le vendredi, il nous faut malheureusement rebrousser chemin vers Chioggia, où nous passerons la dernière nuit afin de rendre la Pénichette à 10h le lendemain. Nous passons et repassons devant Venise, afin de nous imprégner une dernière fois des images et de l’ambiance uniques de la lagune face à sa ville, l’une des plus célèbres du monde.
Au cours du séjour, nous aurions pu pousser encore plus au nord de Burano pour découvrir, par exemple, l’île de Torcello et les vestiges de son centre épiscopal, mais nous avons préféré improviser notre itinéraire selon nos coups de cœur, en prenant le temps d’apprécier, outre les monuments, chaque moment de l’expérience: les petits déjeuners prolongés au soleil sur le pont du bateau, les rencontres avec les Vénitiens – toujours prêts à donner un coup de main pour amarrer la Pénichette -, la navigation autour des îles en compagnie des mouettes, les soirées à lire nos bouquins sur les confortables couchettes du bateau, bercé par la lagune… Une expérience de liberté à vivre une fois dans sa vie. Vraiment.
Tarifs et infos
Les prix dépendent de la taille du bateau, de son modèle et de la saison, mais comptez àpd 1500 euros la semaine pour un couple ou une petite famille dans la lagune de Venise. Remarquez que si vous deviez séjourner 7 nuits dans un hôtel du centre de Venise, vous arriveriez au même tarif! Notez encore que Locaboat loue ses Pénichettes dans d'autres destinations: en France (Canal du Midi, Bourgogne, Loire, Camargue, Alsace…), en Allemagne, aux Pays-Bas, en Irlande et en Pologne.
Plus d’infos: www.locaboat.be